🎧 Faux, Patrick Muyaya ne s’est pas enrĂ´lĂ© dans l’armĂ©e

Depuis fin janvier, des rumeurs en ligne affirment que Patrick Muyaya, ministre de la Communication et des Médias et porte-parole du gouvernement, aurait rejoint les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour combattre les rebelles de l’Alliance Fleuve Congo/M23 dans l’Est du pays. Pourtant, la photo utilisée pour appuyer cette affirmation date de 2023 et a été sortie de son contexte. Décryptage.

Depuis le 31 janvier, une rumeur circule sur les réseaux sociaux affirmant que Patrick Muyaya, ministre de la Communication et des Médias, porte-parole du gouvernement, se serait enrôlé dans l’armée pour combattre aux côtés des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et leurs alliés les Wazalendo, contre les rebelles de l’Alliance Fleuve Congo/M23. Une photo du ministre, assis dans un bureau, tenant une carte et esquissant un léger sourire, a été largement relayée sur les réseaux sociaux. Une des publications relayant cette information sur Facebook a généré plus de 1 600 mentions « J’aime », 654 commentaires et 32 partages jusqu’au 10 février. La rumeur s’est également propagée sur Instagram et TikTok.

Image sortie de son contexte

En réalité, l’image en question remonte à décembre 2023. Elle avait été prise lorsque Patrick Muyaya recevait sa première carte d’identité nationale, un document dont la délivrance avait été interrompue depuis 40 ans en RDC. Le ministre avait lui-même partagé ce moment sur son compte X (ex-Twitter) le 15 décembre 2023. Une recherche d’image inversée via Google Lens a confirmé que la photo avait déjà été publiée à cette date, avec les mêmes informations.

N’ayant pas pu joindre directement Patrick Muyaya, face à ces allégations, Vunja Uongo, la cellule de vérification des faits du Studio Hirondelle RDC, a contacté Cinardo Kivuila, attaché de presse du ministre. « C’est une fausse information », a-t-il déclaré, précisant que le concerné « est présent et continue de travailler sur le front médiatique, collaborant avec les journalistes, les influenceurs et tous les acteurs des médias ».

Au-delà du démenti officiel, la rumeur se heurte également aux dispositions légales. L’article 20 de la loi n°13/005 du 15 janvier 2013, publié dans le Journal officiel, qui régit le statut des militaires des FARDC, interdit formellement aux membres de l’armée d’exercer le commerce directement ou par personne interposée, d’accepter tout mandat électif, d’adhérer ou de prêter son concours à un mouvement, groupement, organisation ou association à caractère politique, ethnique ou tribal. Des conditions qui excluent le ministre qui est activement engagé en politique en tant que membre du Parti Lumumbiste Unifié (PALU) et membre du gouvernement Suminwa.

Contexte sécuritaire tendu

Cette rumeur intervient alors que la situation sécuritaire continue de se dégrader dans l’Est du pays. Depuis fin janvier, la ville de Goma, capitale du Nord-Kivu, est sous le contrôle des rebelles de l’AFC/M23, soutenus par le Rwanda. Le 5 janvier, ces derniers ont présenté un nouveau gouverneur et deux vice-gouverneurs à la population au Stade de l’Unité. Après avoir pris la cité minière de Nyabibwe, ils progressent vers Bukavu, capitale du Sud-Kivu, et menacent son aéroport.

Face à cette avancée, le gouvernement de Kinshasa a multiplié les appels à la mobilisation, incitant les jeunes à rejoindre les rangs de l’armée. Albert Kahasha Murhula, ministre provincial de l’Intérieur et de la Sécurité du Sud-Kivu, a expliqué à Radio Okapi que les volontaires suivent une formation accélérée avant d’être envoyés au front. Lui-même, ancien officier, a annoncé lors d’un meeting qu’il quittait ses fonctions pour combattre les rebelles qui menacent sa province.

En période de guerre, la désinformation est omniprésente en ligne comme au sein de nos communautés. Face ce désordre de l’information, certains journalistes relaient malheureusement des fausses informations sur leurs médias ou leurs comptes sur les réseaux sociaux. Il est donc crucial de faire preuve de vigilance et d’esprit critique pour parvenir à démêler le vrai du faux.

La rumeur de la semaine est une rubrique pour décrypter les fausses informations qui circulent sur nos réseaux sociaux et au sein de nos communautés locales sur le terrain. Un décryptage réalisé par Vunja Uongo, l’équipe de la cellule de vérification du Studio Hirondelle RDC.