Depuis le 23 mars, des photos et des vidéos montrant l’épouse de Joseph Kabila, ancien président de la République, débarquer du bateau Emmanuel au port de Bukavu, circulent sur les réseaux sociaux où elles sont présentées comme récentes. Après vérifications, la cellule de vérification du Studio Hirondelle RDC a retrouvé le vrai contexte de ces images, prises en 2024, avant la chute du chef-lieu de la province du Sud-Kivu entre les mains des rebelles de l’Alliance fleuve Congo (AFC/M23).
Sur le réseau social X, ce contenu a notamment été partagé par un membre connu de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), générant plus de 15.000 vues. Pourtant, une recherche d’images inversées via Google Lens a permis de rétablir les faits. Ces clichés ont été pris le 23 mars 2024 lors de l’arrivée d’Olive Lembe Kabila à Bukavu, en provenance de Goma, pour une « série d’actions caritatives ». À l’époque, les deux villes étaient alors sous le contrôle des forces loyalistes. Depuis la chute de Goma, en janvier, puis de Bukavu, en février, l’ancienne première dame n’a pas visité les deux villes, à en croire son entourage qui a confirmé sa présence à Kinshasa.
Joint au téléphone, un des proches collaborateurs d’Olive Lembe a formellement démenti son déplacement vers les zones contrôlées par l’AFC/M23. Ce membre du pré carré de l’épouse Kabila a expliqué que l’ancienne première dame se concentre sur « ses activités agricoles et sociales », refusant cependant d’alimenter ces rumeurs. Selon lui, le clan Kabila a adopté une « stratégie de communication » de ne pas répondre à la « manipulation orchestrée par des personnes bien connues pour nuire aux Kabila ».
Cette désinformation intervient alors que Joseph Kabila, l’époux d’Olive Lembe, est accusé d’avoir des accointances avec la rébellion. Accusé par son prédécesseur d’être le « vrai commanditaire » de l’AFC/M23, l’ancien président a démenti, invitant son successeur à apporter des preuves. L’émergence de cette désinformation autour d’un voyage de l’épouse Kabil à Bukavu a particulièrement attisé des tensions sur la toile à cause du contexte politico-sécuritaire actuel.
Sur Internet, il est fréquent que la désinformation serve de socle ou de base pour faire asseoir ou construire une thèse politique. Cela est rendu possible par l’entremise des « biais cognitifs », des raccourcis mentaux qui influencent la perception et le jugement. Les plus connus sont les biais de confirmation. Ils consistent à croire facilement aux informations qui confirment les croyances et prédispositions.
Technique de désinformation très répandue, la réutilisation des images hors de leur contexte peut raviver les tensions et semer le doute. Il est donc important de toujours vérifier les informations, y compris celles provenant des officiels.
La rumeur de la semaine est une rubrique pour décrypter les fausses informations qui circulent sur nos réseaux sociaux et au sein de nos communautés locales sur le terrain. Un décryptage réalisé par Vunja Uongo, l’équipe de la cellule de vérification du Studio Hirondelle RDC.