🎧 Dans les zones en conflit, les femmes tentent de survivre entre violences, dĂ©placements forcĂ©s et prĂ©caritĂ©

Dans les zones en conflit dans l’est comme dans l’ouest de la République démocratique du Congo, les femmes paient un lourd tribut aux conflits armés. Violences sexuelles, déplacements forcés, perte de revenus… Entre insécurité et précarité, leur quotidien est un combat.

94 % des victimes des violences sexuelles liées au conflit dans l’Est du pays sont des femmes et des filles. C’est ce qu’affirment des expertes indépendantes des Nations unies dans un communiqué publié le 24 février. Elles alertent également sur une « nouvelle augmentation » de ces violences, aggravée par l’avancée des rebelles de l’Alliance Fleuve Congo/M23.

L’UNICEF a, de son côté, rapporté qu’au cours de la semaine du 27 janvier au 2 février 2025, le nombre de victimes de viol accueillies dans 42 structures de santé à Goma avait quintuplé. Parmi elles, 30 % étaient des enfants. Le 8 mars, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a signalé que 900 femmes avaient été violées entre le 1er et le 15 février dans les zones occupées par les rebelles de l’Alliance Fleuve Congo/M23.

Des violences perpétrées par toutes les parties

Dans un rapport publié le 18 mars, Amnesty International dénonce des viols commis à la fois par les rebelles du M23 et par des soldats de l’armée congolaise. « Une femme a témoigné avoir été accusée d’espionnage par des combattants du M23. Cinq d’entre eux, en uniforme militaire et armés, l’ont violée collectivement. Dans un autre cas, deux soldats congolais ont violé une femme enceinte et enlevé son mari », rapporte l’ONG.

Tigere Chagutah, directeur du programme Afrique de l’Est et Australe à Amnesty International, exhorte la communauté internationale à agir : « le M23 et l’armée congolaise, qui sont tenus de respecter le droit international humanitaire, doivent répondre de ces viols. Le monde ne doit pas fermer les yeux sur les crimes qui sont perpétrés dans l’est de la RDC ».

Femmes déplacées et sans ressources, commerce paralysé et famille sans revenus

Dans ce contexte de violences, des milliers de femmes ont dû fuir leur village pour se réfugier dans des camps de déplacés, souvent dans des conditions déplorables. À Goma, certaines ont été contraintes de quitter ces camps. « Nous vivions à Kanyaruchinya, mais les nouvelles autorités nous ont demandé de retourner dans nos villages, raconte une mère de quatre enfants, rencontrée près d’une école en périphérie de la ville. Mais retourner où ? Ma maison à Kibumba a été détruite par des bombes. C’est pourquoi j’ai construit une petite hutte en bâche ici, dans le quartier Kasika. Nous n’avons rien : ni nourriture, ni vêtements. Nous vivons dans une grande détresse… Que les personnes de bonne volonté nous viennent en aide ! »

Au-delà des violences physiques, la guerre pèse aussi lourdement sur l’économie locale. À Uvira, dans le Sud-Kivu, de nombreuses femmes commerçantes se retrouvent bloquées à la frontière avec le Burundi, incapable de poursuivre leur activité. « Traverser vers le Burundi est devenu extrêmement difficile. L’ouverture des frontières dépend du bon vouloir des autorités burundaises : on peut se présenter à 6h00 en pensant traverser à 7h00, mais parfois, elles n’ouvrent qu’à 10h00 », explique Vumiliya Kwibe, une commerçante locale. Elle ajoute : « Même lorsque nous obtenons l’autorisation, le processus est compliqué. On ne peut même pas transporter les 10 kilos de marchandises autorisés par le RECOS. Il faut payer des personnes pour nous aider à les faire passer en petites quantités. La guerre nous étouffe, nous, les petits commerçants ».

Un déplacement forcé sans retour pour certaines victimes

Dans l’Ouest de la RDC, des femmes ayant fui le conflit communautaire Teke-Yaka, exacerbé par l’activisme de la milice Mobondo, ne comptent pas rentrer chez elles. C’est le cas d’Odrad Kitenge, 32 ans, dont le mari a été tué à Bisiala. « Mon mari était chasseur. Il a été tué par les miliciens Mobondo, comme beaucoup d’autres. Jamais je ne retournerai à Bisiala. Dieu m’a sauvée, je ne peux plus risquer ma vie là-bas », affirme-t-elle, brisée.

Pour approfondir ces témoignages et comprendre les enjeux de cette crise sécuritaire et humanitaire sur les femmes, écoutez notre magazine en français, kikongo, lingala, swahili et tshiluba.