🎧 Faux, Donald Trump ne s’est pas exprimé sur les conflits dans l’Est de la RDC

Une rumeur virale circulant en ligne a prétendu que Donald Trump, réélu président des États-Unis en novembre, aurait fait des déclarations sur les conflits armés dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Après analyse, Vunja Uongo, notre cellule de vérification a démontré que ces propos lui sont faussement attribués. Décryptage.

Selon cette publication, largement partagée notamment dans le groupe Facebook Goma Infos, Trump aurait tenu ces propos à West Palm Beach, en Floride, juste après sa victoire à la présidentielle face à Kamala Harris. Dans son discours, il aurait abordé des questions internationales spécifiques comme la guerre dans l’Est de la RDC.

La rumeur datée du 7 novembre affirme, je cite : « Aussitôt élu, Donald Trump parle de la RDC et du Rwanda : ‘‘ J’entends des bandits en RDC qui se disent être des M23. Je vais être clair avec eux ; les M23 n’existent pas. C’est l’armée de Kagame qui opère en RDC. Ils doivent quitter le sol congolais. Au sujet des FDLR, Paul Kagame doit impérativement dialoguer avec ces FDLR qui ne font rien du mal. Je vais bientôt agir. Pour les wazalendo qui protègent leur pays, je vais dire ici qu’ils sont tellement soutenus ’’ ». Elle a suscité de nombreux commentaires chez les internautes congolais, surtout dans le contexte actuel de guerre entre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et le groupe armé Mouvement du 23-Mars (M23), soutenu par le Rwanda. Pourtant, ces déclarations sont fausses.

Confirmation des autorités américaines

Pour vérifier cette information, nous avons analysé le discours de victoire de Donald Trump, prononcé après sa réélection. Cette allocution, qui dure environ 30 minutes, se concentre uniquement sur les thèmes nationaux américains comme l’unité nationale et son ambition de « guérir » l’Amérique. Aucune mention de la RDC, du Rwanda ou du M23 n’a été faite.

L’Ambassade des USA à Kinshasa a parlé d’une fausse information. Joint au téléphone, Gregory Porter, porte-parole du consulat, nous a confirmé par WhatsApp qu’il s’agit d’une fausse information. « Trump n’a rien dit sur la RDC », a-t-il insisté. De plus, Newsweek, un magazine américain d’actualité reconnu, a publié la transcription intégrale du discours dans un article, confirmant l’absence totale de référence à la RDC.

La rumeur est accompagnée d’une photo montrant Donald Trump tenant un discours. Grâce à une recherche d’image inversée via Google Lens, nous avons découvert que cette photo date du 23 octobre 2024. Elle a été prise lors d’un meeting en Géorgie, par la photographe américaine Anna Moneymaker pour la banque d’images Getty images notamment. Bien que la photo soit authentique, elle a été utilisée hors de son contexte.

Réintégration de la RDC dans l’AGOA grâce à Trump

Bien que le dirigeant américain n’a pas récemment exprimé une position sur les conflits dans l’Est du Congo-Kinshasa, en 2020, lors de son précédent mandat, Trump avait décidé de réinscrire le pays sur liste des pays qui pouvant bénéficier des préférences commerciales offertes par l’AGOA (Loi sur la croissance et les opportunités en Afrique), dix ans après son exclusion. Cette décision a été prise au moment où les USA s’affichaient comme l’un des partenaires stratégiques du président Félix Tshisekedi.

Mais en mars 2024, Donald Trump a accusé « le Congo », sans préciser lequel, d’avoir libéré des prisonniers pour les envoyer aux États-Unis. Dite en anglais, nous avons traduit la déclaration par nos soins de cette manière : « Le Congo vient de libérer un grand nombre de personnes de prison. Le Congo, en Afrique, a libéré de nombreuses personnes de ses prisons et les a envoyées aux États-Unis d’Amérique. Voilà ce qui se passe dans notre pays, et c’est insoutenable pour quiconque ». Une affirmation rapidement démentie par le gouvernement congolais, surtout que les initiatives de désengorgement des différentes prisons de la RDC ont été lancées bien de mois plus tard. « Tout ce qu’il dit n’est pas vrai », avait alors contredit le porte-parole du gouvernement Patrick Muyaya à la chaîne de télévision américaine CNN. « Nous souhaitons qu’il arrête », a-t-il ajouté, précisant que « c’est très mauvais » pour l’image du pays.

Pourquoi cette rumeur est préoccupante ?

Cette fausse information a été partagée dans plusieurs groupes Facebook, notamment Goma Infos qui compte plus de 300 000 membres. En parcourant les commentaires, il apparaît que certains internautes y ont cru. Ce type de désinformation est dangereux, surtout dans un contexte de guerre où les tensions entre communautés peuvent rapidement s’intensifier. Propager de fausses informations peut donc exacerber les divisions et alimenter les conflits.

Souvent, une recherche rapide sur Google ou l’analyse des sources peut vous permettre de détecter une fausse information. Il faut s’efforcer de prendre le temps de vérifier ce qui circule en ligne ou dans nos communautés pour éviter de contribuer à la désinformation.

La rumeur de la semaine est une rubrique pour décrypter les fausses informations qui circulent sur nos réseaux sociaux et au sein de nos communautés locales sur le terrain. Un décryptage réalisé par Vunja Uongo, l’équipe de la cellule de vérification du Studio Hirondelle RDC.